LE TRÉSOR VOLÉ PAR LA FRANCE

La restitution des archives et des biens spoliés par la France constitue un véritable casse-tête, tant pour des raisons historiques que juridiques et diplomatiques. Il ne s’agit pas seulement de simples documents administratifs, mais d’un vaste pillage culturel et matériel, dont l’un des épisodes les plus marquants demeure le butin saisi au lendemain de la prise d’Alger en 1830. Cette question, véritable épée de Damoclès, reste une source de tensions récurrentes entre la France et l’Algérie, empêchant jusqu’à présent toute résolution définitive. Parmi les spoliations les plus emblématiques figure un trésor colossal : dix navires remplis d’or et d’argent, emportés par la France après la chute d’Alger. Aujourd’hui, leur valeur est estimée à plusieurs milliards de dollars. Ce pillage pourrait être considéré comme l’un des plus grands hold-up de l’histoire, surpassant même les richesses arrachées par les conquistadors espagnols aux peuples autochtones d’Amérique.Outre ce trésor, de nombreux objets symboliques et précieux ont été emportés en France et demeurent encore aujourd’hui dans des musées et collections publiques. Parmi eux, les clés de la citadelle d’Alger, remises à l’armée française par le dey Hussein lors de la capitulation de 1830. Ces clés, conservées au musée de l’Armée à Paris, ont fait l’objet d’une demande de restitution rejetée par le ministère français de la Culture. Un autre symbole puissant du patrimoine algérien demeure le canon Baba Merzoug, qui protégeait la baie d’Alger depuis le XVIe siècle. Capturé par les Français en 1833 et rebaptisé La Consulaire, il trône aujourd’hui dans le port militaire de Brest. En 2012, le président François Hollande avait évoqué sa restitution, mais cette initiative a été bloquée par des obstacles juridiques et administratifs. L’Algérie réclame également le retour de biens appartenant à l’un de ses plus grands résistants, l’émir Abdelkader.Son épée, son burnous et ses manuscrits, confisqués en 1843, sont aujourd’hui précieusement gardés en France. En décembre dernier, le ministre algérien des Affaires étrangères, Ahmed Attaf, a dénoncé le refus français de restituer ces objets, sous prétexte qu’une loi spécifique serait nécessaire pour leur restitution.  Le pillage ne s’est pas limité aux objets matériels. Les bibliothèques françaises conservent de nombreux manuscrits et documents historiques algériens. Parmi eux, les 37 manuscrits de l’émir Abdelkader, toujours conservés à la bibliothèque du musée Condé à Chantilly. La bibliothèque personnelle du Cheikh El Haddad, figure de la résistance algérienne lors de l’insurrection de 1871-1872, repose quant à elle à la Bibliothèque universitaire des langues et civilisations (BULAC) à Paris. En 2006, l’Algérie a également demandé la restitution des têtes de statues antiques découvertes à Cherchell, ainsi que des copies de gravures d’Henri Lhote. Mais ces requêtes, tout comme celles concernant les registres des musées nationaux pillés après l’indépendance, sont restées lettre morte. Bref !  Si la France continue de rechigner à restituer l’essentiel du patrimoine algérien, quelques objets ont néanmoins été rendus. En 2003, lors de la visite du président Jacques Chirac en Algérie, le sceau du dey d’Alger, pris par le maréchal de Bourmont en 1830, a été restitué. Un autre geste fort a eu lieu le 4 juillet 2020, lorsque la France a rendu à l’Algérie les crânes de 24 résistants algériens, conservés au Muséum national d’histoire naturelle de Paris depuis plus d’un siècle. L’histoire de la colonisation française en Algérie est jalonnée d’épisodes de spoliation massive. Pourtant, le mystère du trésor d’Alger, ces dix navires chargés d’or et d’argent, demeure un sujet sensible dont la France préfère éviter de parler. Son ampleur fait de lui l’un des plus grands pillages de l’histoire moderne, un acte dont la reconnaissance et la réparation restent encore aujourd’hui en suspens. Un Pillage énigmatique et  Toujours Tabou.

La rédaction

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